Économie circulaire : origine et histoire du concept

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Femme souriante avec sac de recyclables près des poubelles

1976, année où la Commission européenne fait une déclaration qui résonne encore aujourd’hui : il faut dissocier croissance économique et consommation de ressources. À l’époque, rares sont ceux qui s’écartent du modèle industriel linéaire : on extrait, on fabrique, on jette. Un enchaînement implacable, accepté sans broncher.

Pourtant, dès les années 1970, ce schéma commence à vaciller. Les crises pétrolières font vaciller les certitudes. Ingénieurs et économistes, venus d’horizons variés, cherchent des alternatives. Leurs travaux, forgés dans l’urgence et la nécessité, vont ouvrir la voie à une nouvelle façon de penser la production et la gestion des ressources.

Pourquoi parle-t-on autant d’économie circulaire aujourd’hui ?

La pression s’intensifie : les ressources naturelles s’amenuisent, les déchets s’empilent. Impossible d’ignorer la transition écologique, qui s’impose partout comme enjeu collectif aussi bien qu’industrie. Le modèle linéaire, extraire, produire, consommer, jeter, touche à ses limites. Il aggrave le gaspillage et accroît la dépendance à des matières premières dont l’accès devient chaque jour plus incertain, pris dans les tensions géopolitiques et les crises environnementales.

L’économie circulaire trace une nouvelle voie : limiter le gaspillage, réduire les déchets, préserver les ressources. Le principe est clair : il s’agit de dissocier la croissance économique de la consommation de ressources. C’est une orientation portée par la Commission européenne et déclinée par l’Ademe en France au travers d’actions très concrètes : prolonger la durée de vie des produits, renforcer le réemploi, stimuler la seconde main et mettre les entreprises face à leur responsabilité via la responsabilité élargie des producteurs (REP).

La société s’adapte : désormais, les consommateurs questionnent l’utilité de leurs achats, surveillent leur empreinte écologique, exigent réparabilité et traçabilité. Certains industriels s’engagent avec sincérité dans cette transition, tandis que d’autres ne jouent qu’en surface à coup de greenwashing. L’adoption de la loi AGEC en 2020 accélère la cadence : fini le plastique jetable à tout-va, place à un recyclage bien encadré et à la volonté de faire reculer l’obsolescence programmée, enfin prise au sérieux par la loi.

Un défi immense s’impose : transformer en profondeur l’héritage industriel du siècle dernier. L’économie circulaire n’est plus un slogan tape-à-l’œil ; c’est un levier central pour repenser production, consommation et traitement de nos déchets à la lumière du développement durable.

Aux origines du concept : un modèle inspiré par la nature

L’économie circulaire n’est pas une idée tombée du ciel ni une simple tendance à la mode : elle puise ses fondements dans la nature elle-même. Dans tout environnement naturel, chaque déchet nourrit un nouveau cycle, tout se transforme, rien ne stagne.

Dès les années 1970, la réalité écologique et la crise énergétique forcent la réflexion. Des innovateurs comme Walter Stahel à Zurich, Michael Braungart et William McDonough entament des recherches qui poseront les bases : favoriser le réemploi, systématiser le recyclage, intégrer l’écoconception. Leur vision s’affirme avec la publication de « Cradle to Cradle » en 2002 : il ne s’agit plus de gérer une « fin de vie », mais de déclencher de nouveaux commencements à chaque étape du cycle produit.

Le réflexe de récupération ne date pas d’hier. Déjà, sous l’Empire romain, le métal repartait en fonte, le papier naissait grâce à la récup’ de tissus. Bien avant que la politique s’en mêle, la rareté imposait d’agir avec pragmatisme.

Pour cerner les grands axes qui structurent aujourd’hui l’économie circulaire, voici ses sept piliers :

  • approvisionnement durable
  • écoconception
  • écologie industrielle
  • économie de fonctionnalité
  • consommation responsable
  • allongement de la durée d’usage
  • recyclage

La circularité parfaite reste un idéal inaccessible, les pertes de matières et d’énergie existent encore. Mais en s’alignant sur le fonctionnement des écosystèmes, l’économie circulaire trace le chemin vers une société plus sobre, plus résiliente, mieux armée pour affronter ce qui vient.

Les grandes étapes de l’histoire de l’économie circulaire

L’économie circulaire se façonne véritablement au début des années 2000. C’est la décennie où la Fondation Ellen MacArthur prend son envol (2010) : elle vulgarise le concept, pousse les décideurs publics et privés à s’en emparer sans détour.

En France, la feuille de route se précise à mesure que la législation évolue. D’abord la loi de transition énergétique pour la croissance verte (2015), ensuite la loi AGEC (anti-gaspillage pour une économie circulaire, 2020), qui imposent des objectifs concrets : limiter le plastique jetable, renforcer le recyclage, barrer la route à l’obsolescence programmée, réduire davantage les déchets enfouis. La responsabilité élargie des producteurs (REP) devient incontournable pour traiter le cycle de vie des produits jusqu’au bout.

Dès 2015, à l’échelle européenne, la Commission européenne lance un plan d’action sans précédent : doubler d’ici 2030 la part des matières circulaires utilisées. Côté français, l’ADEME accompagne les acteurs avec outils, méthodologies et suivi serré.

Mais sur le terrain, les chiffres marquent le pas. Le taux de circularité mondial restait à 9,1 % en 2018, descend à 7,2 % en 2023. La marche reste haute, la dynamique sincère mais la route, semée d’embûches. Quoi qu’il en soit, la succession de réformes et la mobilisation collective placent l’économie circulaire au cœur des politiques environnementales, et plus personne ne regarde ailleurs.

Jeunes créant prototypes avec matériaux recyclés en atelier

Enjeux actuels et bénéfices concrets pour une société plus durable

L’économie circulaire s’affirme comme la piste la plus réaliste à l’épuisement du linéaire. L’objectif reste clair : réduire le gaspillage, limiter la production de déchets, préserver les ressources naturelles. Les entreprises y voient un moyen de repenser leurs process, d’optimiser les flux, de renforcer leur RSE sur la durée.

Regardons autour : le marché de la seconde main grimpe en flèche, la réparation profite d’un nouveau souffle, le recyclage change d’échelle. Un exemple : ETERNITY Systems. Leur créneau ? Le lavage industriel d’emballages réemployables : chaque contenant est tracé, réparé si besoin, la logistique s’optimise. Ce type de solution, déjà en place dans des régions comme l’Occitanie ou les Hauts-de-France, bénéficie aussi d’un coup de pouce institutionnel, signe que la dynamique prend racine au-delà de quelques pionniers.

Pour mesurer l’impact de cette approche, on peut citer les retombées suivantes :

  • Allongement du cycle de vie des produits
  • Diminution de la dépendance aux matières premières vierges
  • Développement d’une économie qui valorise le service, la mutualisation et la coopération
  • Réduction globale de l’empreinte environnementale

La responsabilité élargie des producteurs (REP) impose au secteur privé d’assumer jusqu’au bout la gestion de ses produits, sous l’œil attentif des autorités. La circularité totale reste un cap difficile à atteindre. Les pertes de matières et d’énergie persistent. Mais l’élan collectif, ancré dans les attentes citoyennes et les réformes, s’inscrit durablement à contre-courant de toute mode passagère.

Demain, tout va se jouer. L’économie circulaire marquera-t-elle enfin la grande bascule de l’industrie, ou devons-nous nous préparer à un nouveau cycle inachevé ?